quinta-feira, 28 de janeiro de 2016

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Le douloureux parcours des femmes enceintes à la rue
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Par Caroline Piquet
Publié le 28/01/2016 à 06:00




La fondation Abbé-Pierre alerte sur la situation de ces femmes précaires en France, regrettant l'absence de suivi médical en amont de la grossesse et le manque de logements adaptés à leur sortie de la maternité.

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«Le 115 pour berceau?» C'est par cette question que la fondation Abbé-Pierre (FAP) alerte les pouvoirs publics et dénonce, dans son 21e rapport consacré au mal-logement en France, la situation de nombreuses femmes enceintes et précaires en France. «Nous regrettons l'absence de suivi en amont de la grossesse et un manque de logements adaptés à la sortie de la maternité», résume Manuel Domergue, directeur des études à la fondation. Cette situation «conduit à des problèmes de santé chez les femmes enceintes et à des grossesses difficiles», déplore une sage-femme de l'hôpital Delafontaine en Seine-Saint-Denis, citée dans le rapport.

En France, 40% des sans domicile (en situation d'hébergement, en abri de fortune, à l'hôtel, etc.) sont des femmes, parmi lesquelles 5% sont sans abri. En revanche, il n'existe aucun chiffre national sur le nombre de femmes enceintes confrontées au mal-logement ou à la rue. «Elles sont difficile à recenser», glisse une assistance sociale, sous couvert d'anonymat. Mais elles seraient de plus en plus nombreuses. Depuis 2012, le nombre de familles avec enfants et de femmes seules ayant recours au 115 a augmenté de 16 et 12%, selon un rapport publié en 2014.
Un suivi médical insuffisant, voire absent

Les profils sont multiples: ce sont des femmes qui ont fui un pays en guerre, issues de la population Rom ou en rupture familiale. Certaines ont été victimes de violences conjugales ou mises à la porte après l'annonce d'une grossesse. D'autres se sont retrouvées à la rue pour des raisons financières, souvent après la perte d'un emploi. En 2014, l'association Médecins du Monde a reçu 700 femmes enceintes, dont près d'un tiers vivaient à la rue, en squat ou en campement. Et seules 5% disposaient d'une couverture maladie. La majorité d'entre elles étaient d'origines étrangères et, pour certaines, en situation irrégulière ou en cours de procédure pour une demande d'asile, selon son dernier rapport sur l'accès aux droits et aux soins des plus démunis en France.

Par méconnaissance ou par crainte de voir un médecin, ces femmes mettent du temps avant de consulter. «Dans près d'un tiers des cas, le diagnostic de grossesse a été posé lors de la consultation médicale», souligne Médecins du Monde. Par ailleurs, près de la moitié présentait un retard de suivi de grossesse et seules 42 % avaient eu accès à des soins prénataux. À titre de comparaison, en France, 95% des femmes bénéficient d'une prise en charge précoce et consultent dès le premier trimestre, note le Samu social de Paris dans un de ses rapports. Pour rappel, le suivi médical recommandé comprend au moins sept consultations chez le médecin et trois échographies, plus des dépistages de maladie.
Trois fois plus de naissances prématurées

«Dans la précarité, la temporalité n'est pas la même. Il est difficile de respecter les horaires et d'honorer les rendez-vous», constate le Dr Bernard Guillon, gynécologue obstétricien et président de l'association pour le développement de la santé des femmes (ADSF). Depuis 2003, son association organise des maraudes nocturnes dans la région parisienne pour aider les femmes en grande précarité. «Il y a aussi celles qui sont en situation irrégulière, qui craignent d'être reconduites à la frontière en franchissant la porte d'un hôpital et qui ont peur que leurs enfants soient placés», ajoute le gynécologue, qui estime à un millier le nombre de femmes ayant accouché, chaque année, dans un hôpital parisien sans avoir vu le moindre médecin.

Les pathologies de grossesses sont pourtant plus courantes chez les femmes précaires. Plusieurs études montrent qu'il y a trois fois plus de naissances prématurées que dans la population générale, deux fois plus de nouveau-nés de petits poids et deux fois plus de césariennes en urgence. Selon une étude de l'Inserm, les risques de décès maternels sont aussi deux fois plus importants chez les femmes étrangères que chez les Françaises. «Ces complications sont généralement dues au manque de suivi médical, mais aussi au stress, aux mauvaises conditions alimentaires et aux déplacements fréquents qu'elles subissent», détaille le Dr Guillon.


«Elles sont ballottées d'un hôtel à l'autre et vivent dans des chambres miteuses»Manuel Domergue, directeur des études à la Fondation Abbé Pierre

Sorties de l'hôpital, leur situation n'est guère meilleure. Se faire héberger avec un nourrisson chez un tiers s'avère plus compliqué après un accouchement. «Accueillir une personne célibataire, c'est faisable. Mais avec un bébé qui vient de naître, ça l'est beaucoup moins», commente Manuel Domergue de la fondation Abbé-Pierre. Sans solution, beaucoup d'entre elles se tournent vers le Samu social (le 115). Jugées prioritaires, elles sont redirigées la plupart du temps vers des hôtels.

Sur Paris, la demande est telle que ces femmes sont souvent hébergées hors de la capitale, en lointaine banlieue. «Il ne faut pas s'imaginer que leur situation est confortable», prévient le responsable associatif. «Même si on essaie de les stabiliser, elles sont ballottées d'un hôtel à l'autre. Elles vivent dans des chambres miteuses, ne peuvent pas y faire à manger et doivent dormir dans le même lit que leurs enfants. Elles sont très isolées et en souffrent psychologiquement.» Actuellement, le Samu social de Paris héberge 199 femmes enceintes de plus de trois mois. En 2015, plus de 1200 enfants sont nés en région parisienne dans une famille hébergée par le 115.
Système D

L'année dernière, le gouvernement s'est engagé à réduire le recours aux hôtels. En Île-de-France, «un effort a été fait pour augmenter le nombre de places dans les centres d'hébergement d'urgence, en particulier pour les familles», reconnaît Bruno Morel, directeur général de l'association Emmaüs Solidarité, qui accompagne aussi des femmes enceintes. D'après la préfecture de Paris, plus de 1000 places d'hébergement pérennes, à destination des familles, sont en cours d'ouverture. Cet hiver, l'État a ouvert plus de 2700 places pour l'ensemble de la région Île-de-France, dont 380 réservées aux familles et femmes avec enfants. À l'hiver 2014, 2250 places avaient été ouvertes.«Mais les structures doivent être pérennisées au-delà de la trêve hivernale», plaide Bruno Morel qui a obtenu l'ouverture d'un centre d'hébergement temporaire accueillant 57 familles et 34 nourrissons fin 2015.

Appeler le 115 ne garantit pas d'avoir un toit. Faute de solution, les hôpitaux essaient parfois de prolonger la prise en charge des femmes venant d'accoucher, le temps de leur trouver une place dans une structure d'accueil. «On les garde quinze jours maximum (...) Le problème, c'est que ça bloque des places pour d'autres femmes ayant également des grossesses pathologiques», déplore une sage-femme exerçant en Seine-Saint-Denis. «Et quand il n'y plus aucune solution, la consigne est de les héberger quand même à l'hôpital», remarque Nathalie Baunot, sage-femme coordinatrice du réseau périnatal Paris-Nord. Il n'est pas rare de voir des femmes dormir dans un hall d'entrée, recroquevillées sur une chaise ou allongées sur un banc, pour ne pas passer la nuit dans le froid.

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