quarta-feira, 22 de julho de 2015

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22 juillet 2015, par Pierre Barthélémy
Qu’y a-t-il encore à explorer dans le Système solaire ?



Vue d'artiste de la sonde Cassini à côté de Saturne. © NASA.

Après le survol réussi de Pluton par la sonde américaine New Horizons, le 14 juillet, après le succès de la mission Rosetta autour de et sur la comète "Tchouri", après la plus discrète mais tout aussi intéressante mise en orbite de la sonde Dawn autour de la planète naine Cérès, on pourrait se dire que c'est bon. Que l'homme, ayant envoyé des engins visiter tous les principaux corps du Système solaire, en a fini avec lui. On pourrait se le dire mais les astronomes ne seraient pas d'accord. Non pas parce qu'ils en veulent toujours plus mais parce que, à y regarder d'un peu plus près, comme vient de le faire l'un d'entre eux, Andrew Coates, dans un article publié par le site The Conversation, au cours de ce gros demi-siècle d'exploration spatiale de notre voisinage, nous n'avons, pour l'essentiel, fait qu'en gratter la surface.



"Patron" du groupe de planétologie au Mullard Space Science Laboratory de l'University College de Londres, Andrew Coates explique qu'en schématisant l'exploration d'un corps du Système solaire passe par quatre grandes étapes. Tout d'abord le survol, comme cela vient d'être fait pour Pluton avec New Horizons. Ensuite vient la mise en orbite d'un engin autour de l'astre pour l'examiner à distance. Phase suivante : y poser un atterrisseur ou un rover pour effectuer des analyses en surface. Quant à la quatrième et dernière étape, elle consiste à rapporter des échantillons sur Terre. On pourrait ajouter un niveau supplémentaire à cette escalade scientifique – ou une phase 4 bis... –, à savoir l'exploration de l'astre par l'homme lui-même.

Le premier objet du Système solaire à avoir subi toutes ces explorations (la Terre ne compte pas dans ce jeu-là...) est bien sûr le plus proche de nous, la Lune. Même si, dans l'imaginaire collectif, la conquête de notre satellite est le fait du programme américain Apollo (mettons de côté les Cyrano de Bergerac, Jules Verne, et autres Tintin et Tournesol...), ce sont en réalité les sondes soviétiques Luna qui ont passé les trois premières étapes de l'exploration lunaire. Début 1959, Luna-1 fut involontairement le premier engin humain à survoler la Lune. Involontairement car la sonde, destinée à s'écraser sur notre satellite, passa à 6 000 kilomètres de sa cible suite à une erreur de calcul. Elle tourne désormais autour du Soleil, quelque part entre les orbites de Mars et de la Terre... Quelques mois après ce semi-échec, Luna-2 fut le premier objet fait de la main de l'homme à toucher la Lune puis Luna-3 prit la première photographie de la face cachée de notre satellite. Notons que, dans le cas de la Lune, les phases 2 et 3 sont inversées : le 3 février 1966, Luna-9 se posa en douceur dans l'"Océan" des Tempêtes et, moins de deux mois plus tard, Luna-10 devint le premier satellite artificiel de notre satellite naturel. Dans les années 1970, trois exemplaires de Luna rapportèrent des échantillons sur Terre – 326 grammes – mais c'était un peu tard. En juillet 1969, les astronautes d'Apollo-11 avaient ramassé une vingtaine de kilogrammes de roches et de sol lunaires et leurs successeurs allaient en rapporter bien davantage...

La quatrième phase, celle du retour d'échantillons, n'a été à ce jour atteinte que pour deux autres corps du Système solaire : l'astéroïde Itokawa sur lequel l'engin japonais Hayabusa a collecté quelque 1 500 grains de sol et la comète 81P/Wild dont la sonde américaine Stardust a traversé la queue, capturant au passage de nombreuses particules. Les chercheurs n'ont rien eu de plus à se mettre sous la dent. Ainsi, pour Vénus comme pour Mars, nous sommes bloqués à l'étape 3. La planète rouge, sur laquelle des robots se posent depuis des décennies, ne nous a pas encore cédé un pouce de son terrain (si l'on excepte les quelques météorites martiennes qui sont arrivées sur Terre)... Pour ce qui est des planètes gazeuses, les astronomes n'espèrent guère poser des engins dessus pour d'évidentes raisons. En revanche, ils aimeraient passer à la phase 2 (mise en orbite d'une sonde) pour Uranus et Neptune qui n'ont pour le moment été que survolées. Et, entre autres projets, ils rêvent notamment d'un atterrisseur sur Europe, satellite glacé de Jupiter dont l'océan souterrain pourrait abriter des formes de vie.

Et après ? En admettant que, dans les décennies futures, tous ces programmes d'exploration finissent par trouver un financement et devenir réalité, en admettant que nous soyons passés à la phase 4 partout où cela sera possible, en admettant que l'homme ait posé un pied sur Mars et qu'il soit capable d'exploiter les minerais des astéroïdes ou les réserves d'hélium 3 de la Lune, comme certains l'espèrent, en aurons-nous assez de prendre le Système solaire comme un grand terrain de jeu scientifique ? Il est probable que non tant la curiosité des chercheurs est immense et tant les résultats d'une mission spatiale suscitent de nouvelles questions qui, en général, ne peuvent trouver de réponse qu'avec un engin encore plus élaboré...

Et puis il y a les confins du Système solaire. Dans un article publié en 1999 dans les Philosophical Transactions A, Andrew Coates, encore lui, évoquait ainsi l'exploration du nuage d'Oort, le réservoir à comètes de notre carré de cosmos. Mais, ajoutait-il aussitôt, avec les moyens de propulsion classiques, le voyage pour parcourir les dizaines de milliers d'unités astronomiques qui nous en séparent (une unité astronomique vaut 150 millions de kilomètres...) "prendrait au minimum 15 000 ans et, pour Proxima du Centaure, l'étoile la plus proche de nous à 4,2 années-lumière, cela prendrait aux alentours de 80 000 ans." A moins d'inventer un mode de propulsion nettement plus efficace, permettant aux vaisseaux spatiaux d'atteindre une fraction non négligeable de la vitesse de la lumière, les astronomes se heurteront donc, comme les auteurs de science-fiction, au mur de la distance. Et pour explorer les autres mondes, ils se contenteront de leurs télescopes.

Pierre Barthélémy (suivez-moi ici sur Twitter ou bien là sur Facebook)

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