sábado, 25 de julho de 2015

Dans "Le Mondefr"


Entre colère et peur, la Corse se mobilise contre la Xylella fastidiosa

Le Monde.fr | 25.07.2015 à 05h32 • Mis à jour le 25.07.2015 à 08h47 |Par Rémi Barroux
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Après la surprise, l’angoisse et la colère. Alors que la présence avérée de la bactérie Xylella Fastidiosa a été signalée par la préfecture de Corse mercredi 22 juillet, le plan de lutte contre le foyer infectieux se met en place.

Vendredi, le préfet de Corse, Christophe Mirmand a signé un nouvel arrêté définissant la zone infectée et les mesures de lutte applicables. Cent mètres autour de la zone, une galerie commerciale « La Foire Fouille » à Propriano, tous les végétaux « douteux » devront être détruits dans les trois jours, avec incinération après abattage. Dans cette zone, la plantation de tout végétal est interdite. Une dérogation doit être demandée à la préfecture en « période d’interdiction d’emploi du feu ».

Enfin, dans une « zone tampon » de dix kilomètres autour de la zone infectée, une surveillance des insectes vecteurs et une « prospection des végétaux spécifiés » devront être effectuées. Deux cents végétaux sont concernés par ce plan de lutte contre la bactérie qui a entraîné la destruction de quelque 30 000 hectares d’oliveraies dans la région du sud de l’Italie, les Pouilles, et pour laquelle aucun traitement n’existe. Dans cette liste, on retrouve la plupart des plantes et arbres qui poussent, cultivés ou à l’état sauvage, en Corse : oliviers, figuiers, eucalyptus, vignes, mimosas, ronciers, prunus, genêts, romarin, luzernes, lauriers roses, myrte, chênes, tournesol, noyers, lierre, frênes, fraisiers, etc. Les plantes contaminées par la bactérie tueuse, contrôlée le 20 juillet, sont des polygales à feuille de myrte (Polygala myrtifolia).
La machine politique s’emballe

Depuis la confirmation de la présence de Xylella fastidiosa, la machine politique s’est emballée. Le 22, la préfecture annonçait sa découverte et convoquait, le jeudi, un conseil régional d’orientation de la politique sanitaire animale et végétale (Cropsav). Une manifestation de producteurs d’olives, particulièrement mobilisés et inquiets, accompagnés de responsables nationalistes — qui avaient été parmi les premiers à dénoncer le danger —, s’est tenue le même jour devant la préfecture. Le soir se tenait à Corte une réunion du collectif de lutte contre la bactérie qui jugeait les mesures préfectorales « insuffisantes », doutant de l’efficacité des moyens mis en œuvre et critiquant l’Etat français. « L’Etat devra donc assumer sa responsabilité face à ses carences récurrentes en matière de protection sanitaire de notre île », a ainsi indiqué le Parti de la nation corse (PNC).

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Invitée de France 3 Corse ViaStella, vendredi soir, la porte-parole du collectif, et conseillère territoriale Femu a Corsica (Faisons la Corse), Agnès Simonpietri, a déclaré que « l’Etat ne prend pas la mesure de la situation ». Le collectif revendique depuis un an l’interdiction totale de tous les végétaux sur l’île. « La bactérie n’est pas détectable à l’œil nu, et on peut, de toute bonne foi, laisser passer un camion avec des végétaux infectés », a précisé Agnès Simonpietri.

A quelques mois des élections territoriales, l’affaire est politique. « Il y a un véritable traumatisme ressenti par l’opinion publique devant le risque de voir une grande partie de la végétation attaquée puis détruite, a confié au Monde Christophe Mirmand. Il y a un attachement au maquis, à la production d’olives, d’agrumes, la place de l’agriculture dans l’identité de l’île est très forte. » Et le préfet redoute, dans ce contexte, de possibles « actions plus radicales, une montée de tension ».
« De la foutaise »

Interrogé par l’AFP, un agriculteur dans la vallée de l’Ortolo, non loin de Propriano où a été découverte la Xylella, estimait ainsi que les « soi-disant contrôles » effectués par les services préfectoraux étaient de « la foutaise ». « Tous les jours, je vois passer des camionnettes et autres véhicules emplis de végétaux sans contrôle dans les résidences secondaires et qui viennent du continent, de l’Italie et de Dieu sait où encore », dénonçait-il.


La pression monte. Une réunion du collectif et de ses soutiens politiques est annoncée pour le mercredi 29 juillet. « Les élections arrivent et on risque d’avoir du monde, alors que certains ne s’étaient pas mobilisés quand il était encore temps », peste Fabienne Maestracci, oléicultrice à Bonifacio, qui tire la sonnette d’alarme depuis de longs mois, souvent esseulée. Pour elle, il faut augmenter les moyens mis à disposition. « A la FREDON [Fédération régionale de défense contre les organismes nuisibles], ils nous disent qu’ils sont douze. Je ne vois pas comment ils vont pouvoir faire pour contrôler toutes les propriétés et le maquis », dit-elle.

De fait, la région à surveiller autour de la zone infectée s’étend, selon la carte dessinée par la préfecture, jusqu’à Sartène et Sainte-Lucie, intégrant de grandes zones de maquis, de forêts et de nombreux villages (21 communes). Le préfet a d’ores et déjà demandé des renforts au ministre de l’agriculture. Il envisage la mobilisation de dizaines de jeunes dans le cadre du service civique. « Pour le contrôle des plantes, la FREDON, le parc régional, les collectivités, les associations, les producteurs, tout le monde doit se mobiliser », estime M. Mirmand.
Travail démentiel

Il faut aussi trier les nombreux appels qui signalent des plantes douteuses au numéro vert mis en place (0800 873 699). « Mais en période de stress hydrique, beaucoup de plantes peuvent paraître desséchées, sans que cela soit la bactérie », précise le préfet. Le directeur de la Fredon, Michaël Lecat, à l’œuvre dans la zone infectée, est en train de recenser les moyens nécessaires. « Le travail à faire est démentiel : pour lutter contre le capricorne asiatique qui s’attaque à tous les arbres à bois tendre comme l’érable ou le tilleul, dans la région de Bastia, on a eu huit personnes pendant cinq mois pour une zone de seulement un à deux kilomètres de rayon, raconte-t-il, affirmant la nécessité de mener à bien le travail de nettoyage et de surveillance.

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L’enquête épidémiologique est toujours en cours pour définir la nature de la souche de la bactérie. Est-ce la même que celle qui sévit dans les Pouilles ? Pour l’heure, une chose est certaine : les polygales infectées ont été plantées en 2010 et une facture fait état de leur importation d’une ville en Toscane. La thèse la plus probable, et la plus inquiétante, serait que les plantes aient été contaminées après leur arrivée sur la terre corse. « On ne nous le dit pas clairement, mais on est sûr que l’insecte vecteur de la maladie est là, il circule beaucoup dans les automobiles et les camions, et dans la zone infectée, une zone commerciale, beaucoup de gens se déplacent et risquent de l’embarquer », dénonce Fabienne Maestracci.

L’arrête préfectoral interdit « tout déplacement et transport de végétaux » dans le secteur délimité. Les sanctions prévues, en cas d’introduction ou de détention « sciemment » et de transport de la bactérie, peuvent aller jusqu’à deux ans de prison et 75 000 euros d’amende, six mois d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende si les traitements et les mesures de prévention ne sont pas appliqués.

Tous les propriétaires vont devoir être vigilants, payer aussi les traitements sur leurs plantes. Quant aux producteurs d’olives, ils continuent de redouter le pire. « Si je dois arracher, je suis ruiné, je n’ai rien d’autre », témoignait, vendredi soir sur France 3 Corse ViaStella, Michel Benetti, oléiculteur à Olmetto, à quelques kilomètres de Propriano. Le cœur brisé à l’idée de devoir, peut-être, abattre un olivier âgé de 1 000 ans.






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Rémi Barroux
Journaliste au MondeSuivre Aller sur la page de ce journaliste





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